Le maintien d’habitudes de vie saine est particulièrement important dans la gestion de la migraine. Nous aborderons ainsi notamment les particularités quant au sommeil, l’alimentation, l’activité physique, et le stress.
Sommeil
Trop comme pas assez de sommeil peut être un facteur déclenchant de migraine, quoique le manque de sommeil est plus souvent mentionné [109]. Quoiqu’il en soit, il importe d’avoir des habitudes de sommeil saines et régulières. Idéalement, quand le sommeil est difficile, on devrait réserver la chambre à coucher pour le sommeil et l’intimité. Une température fraîche est idéale. L’activité physique aide au sommeil profond mais il faut éviter que ce soit trop intense trop près de l’heure du coucher. On devrait éviter la caféine en soirée et le tabac avant le coucher. L’alcool peut aider à s’endormir mais fragmente le sommeil.
Cet aspect est particulièrement important, compte tenu qu’une étude récente a démontré que les migraineux avec symptômes dopaminergiques, c’est-à-dire notamment bâillement, fatigue, somnolence, et changement de l’humeur, sont plus à risque d’avoir des migraines plus sévères [195].
Nourriture
Il est bien connu que certains aliments peuvent précipiter une migraine. Les plus fréquents sont le fromage, le chocolat et l’alcool. En fait, la liste est beaucoup plus longue et il ne convient pas d’éviter chacun de ces facteurs déclenchants, mais ceux qui semble être déterminant pour la personne migraineuse. Étrangement, notons toutefois qu’une étude a suggéré qu’une modification de la diète alimentaire ne diminuait pas de façon significative le profile migraineux [110]. Une revue de la littérature a récemment confirmé cette observation [196].
Notons qu’en plus des facteurs déclenchants alimentaires, il importe de savoir que de sauter un repas et la déshydration peuvent également déclencher une migraine [111,112].
Diète cétogène
La diète cétogène est une diète qui favorise le gras et limite drastiquement l’apport en carbohydrates, forçant le corps à utiliser des voies énergétiques différentes. Le corps va ainsi brûler les graisses plutôt que les sucres. Cette diète a possiblement un effet protecteur sur le cerveau.
Par exemple, environ 50% des jeunes avec épilepsie vont avoir une baisse de la fréquence des crises suite à l’adoption de ce régime [162]. Il a été suggéré que cette diète contribue à stabiliser le niveau d’excitabilité cortical, et possiblement à contrer la neuroinflammation présente lors des crises de migraine [163]. Une étude a d’ailleurs démontré une normalisation au niveau cortical du déficit d’habituation connu chez les migraineux et qui persiste normalement même entre les crises [164].
Toutefois, selon Mayo Clinic, il y a pour le moment peu d’évidences pour démontrer que ce type de régime soit efficace, ni sécuritaire, pour autre chose que l’épilepsie [165]. Les diètes à faible apport en carbohydrates ont tendance à avoir plus d’effets secondaires, incluant constipation, céphalées, et mauvaise haleine, notamment. De plus, l’apport élevé de gras saturés et le faible apport de fruits, légumes et céréales représentent un souci important sur la santé cardiovasculaire sur le long terme.
Activités physiques
Comme mentionné précédemment, il commence à avoir des évidences en faveur des exercices aérobiques pour la migraine, diminuant sa fréquence, intensité, et durée [158,196]. Évidemment, lors d’une crise il est déconseillé de faire des activités physiques puisque même les activités de routine sont bien connues pour accroître les symptômes de la migraine. Il importe donc de se motiver et profiter des périodes d’accalmies pour pratiquer l’activité aérobique de son choix. Le mécanisme suggéré passe par une diminution de seuil de déclanchement de la douleur chez ceux qui s’exercent régulièrement [161], possiblement par une diminution des modulateurs inflammatoires, incluant diverses cytokines, et les hormones du stress [196]. En plus de ces effets biologiques, la pratique d’activités physiques semble améliorer une composante psychologique importante quant à la gestion de la douleur, diminuant le fardeau de la migraine [196].
La fréquence et l’intensité de l’exercice qui devraient être privilégiés demeure toutefois encore un point à éclaircir, quoiqu’il semble se dessiner une tendance vers un niveau d’exercices plus élevé [196]. Certaines études ont même suggéré que l’activité physique semble être au moins aussi efficace que certaines médications prophylactiques, tel que le topiramate. Le but n’Est pas nécessairement de remplacer la médication toutefois, puisqu’il appert que la combinaison des deux approches présente probablement un bénéfice accru.
Notons que la pratique d’un sport va également permettre d’améliorer la qualité de vie, aider dans la gestion du stress, et peut-être permettre d’améliorer son sommeil et son auto-détermination. Une récente revue de la littérature a d’ailleurs identifié le manque de détermination comme étant un des deux traits de personnalité les plus associés à la douleur chronique [115]. Enfin, la pratique d’exercices physiques a même été associé à une réduction de la mortalité, toutes causes confondues [197].
Enfin, mentionnons que les gens souffrant de douleurs chroniques suite à un accident de la route ne semblent pas bénéficier autant de l’hypoalgésie qui accompagne la pratique d’exercices physiques [198,199]. Il est possible que ce soit également le cas pour les sujets souffrants de fibromyalgie [200].
Lumière extérieure
La lumière extérieure intense a été identifiée comme un facteur déclenchant de migraine [130-134]. Or, le port de lunettes avec une teinte particulière (FL-41) a reçu l’attention de quelques études dans la prévention de la migraine (Figure 9). La plus récente étude suggère effectivement une certaine diminution des crises migraineuses lors du port de ce type de lentille [135].
Stress
Jusqu’à 80% des migraineux rapportent que le stress est un facteur important pour provoquer leurs crises migraineuses [113]. Une étude a même démontré que les personnes migraineuses ont une activité sympathique et parasympathique différente que les contrôles lors d’un événement stressant [114]. Bref, la gestion du stress est un point important chez les migraineux, que ce soit grâce à une approche béhaviorale, du yoga, etc.
Références
- [109] Robbins L. Precipitating factors in migraine: A retrospective review of 494 patients. Headache 1994;34:214-216.
- [110] Finkel AG, Yerry JA, Mann JD. Dietary considerations in migraine management: does a consistent diet improve migraine? Curr Pain Headache Rep 2013;17:373.
- [111] Abu-Salameh I, Plakht Y, Ifegane G. Migraine exacerbation during Ramadan fasting. J headache Pain 2010;11:513-517.
- [112] Blau JN. Water deprivation: A new migraine precipitant. Headache 2005;493:9-14
- [113] Kelman L. The triggers or preceipitants of the acute migraine attack. Cephalalgia 2007;27:394-402.
- [114] Avnon Y, Nitzan M, Sprecher E, Rogowski Z, Yarnitsky D. Autonomic asymmetry in migraine : augmnted parasympathetic activation in left unilateral migraineurs. Brain 2004;127:2099-2108.
- [115] Naylor B, Boag S, Gustin SM. New evidence for a pain personality? A critical review of the last 120 years of pain and personality. Scand J Pain 2017;17:58-67.
- [130] 52. Hauge AW, Kirchmann M, Olesen J. Trigger factors in migraine with aura. Cephalalgia 2010;30:346-353.
- [131] Vijayan N, Gould S, Watson C. Exposure to sun and precipitation of migraine. Headache 1980;20:42-43.
- [132] Hougaard A, Amin FM, Hauge AW, Ashina M, Olesen J. Provocation of migraine with aura using natural trigger factors. Neurology 2013;80:428-431.
- [133] Hauge AW, Kirchmann M, Olesen J. Characterization of consistent triggers of migraine with aura. Cephalalgia 2011;31:416-438.
- [134] Vingen JV, Sand T, Stovner LJ. Sensitivity to various stimuli in primary headaches: A questionnaire study. Headache 1999;39:552-558.
- [135] Wilkins AJ, Patel R, Adjamian P, Evans BJ. Tinted spectacles and visually sensitive migraine. Cephalalgia 2002;22:711-719.
- [158] Lemmens J, de Pauw J, Van Soom T, et al. The effect of aerobic exercices on the number of migraine days, duration and pain intensity in migraine: A systematic literature review and meta-analysis. J Headache Pain 2019;20:16.
- [161] Amin FM, Aristeidou S, Baraldi C, et al. The association between migraine and physical exercise. J Headache Pain 2018;19:83.
- [162] Gross EC, Klement RJ, Schoenen J, et al. Potential protective mechanisms of ketone bodies in migraine prevention. Nutrients 2019;10:E811.
- [163] Barbanti P, Fofi L, Arilia C, et al. Ketogenic diet in migraine: Rationale, findings, and perspectives. Neurol Sci 2017;38(Suppl 1):111-115.
- [164] Di Lorenzo C, Coppola G, Bracaglia M, et al. A ketogenic diet normalized interictal cortical but not subcortical responsivity in migraineurs. BMC Neurol 2019;19:136
- [165] Mayo Clinic. The truth behind the most popular diet trends of the moment. https://www.mayoclinic.org/healthy-lifestyle/weight-loss/in-depth/the-truth-behind-the-most-popular-diet-trends-of-the-moment/art-20390062. Accédé le 27 octobre 2019.
- [196] Hindiyeh NA, Zhang N, Farrar M, Banerjee P, et al. The Role of Diet and Nutrition in Migraine Triggers and Treatment: A Systematic Literature Review. Headache 2020 [Ahead of print].
- [196] Barber M, Pace A. Exercise and migraine prevention: A review of the literature. Curr Pain Headache Rep 2020;24:39.
- [197] Zhao M, Veeranki SP, Magnussen CG, Xi B. Recommended Physical Activity and All Cause and Cause Specific Mortality in US Adults: Prospective Cohort Study. BMJ 2020;370:m2031.
- [198] Smith A, Ritchie C, Warren J, Sterling M. Exercise-induced hypoalgesia is impaired in chronic whiplash-associated disorders (WAD) with both aerobic and isometric exercise. Clin J Pain 2020;36:601-611.
- [199] Van Oosterwijck J, Nijs J, Meeus M, et al. Lack of endogenous pain inhibition during exercise in people with chronic WAD: An experimental study. J Pain 2012;13:242-254.
- [200] Lannersten L, Kosek E. Dysfunction of endogenous pain inhibition during exercise with painful muscles in patients with shoulder myalgia and fibromyalgia. Pain 2010;151:77-86.